Question de Irina S. à Presinge : « Je suis locataire d’un logement dans un immeuble et la régie m’indique que le propriétaire a changé et que je dois signer un nouveau bail. Suis-je obligée de le faire ? »
En droit du bail prévaut le principe que « la vente ne rompt pas le bail ». Ainsi, si pendant la durée de la location, la chose louée est vendue, le bail passe automatiquement à l’acquéreur, en vertu de la loi. Il n’est pas nécessaire de refaire un nouveau contrat avec l’acheteur, et une simple communication de la régie indiquant l’identité du nouveau propriétaire est suffisante. C’est d’ailleurs ce qui se passe le plus fréquemment dans la pratique.
Malheureusement, certains propriétaires prennent malicieusement prétexte de l’acquisition pour prétendre « actualiser » le contrat, et entendent faire signer un nouveau document à leur locataire, qui à première vue ne modifie pas le loyer ou la durée, mais recèle d’autres pièges moins évidents.
Par exemple, quand la nouvelle convention est accompagnée d’une formule officielle qui indique que le loyer actuel correspond « aux loyers usuels dans le quartier », cela permet subrepticement au bailleur de prétendre, par la suite, que le taux hypothécaire de référence sur la base duquel est censé fixé le loyer est désormais celui « actualisé ». Donc, historiquement, un taux très bas, voué à augmenter. Ce qui permettra de majorer le loyer dans le futur plus facilement.
Il arrive aussi que le nouveau document soit accompagné de nouvelles « conditions générales », régulièrement truffées de clauses défavorables au locataire, qui sont au demeurant souvent nulles au regard du droit du bail, qui inclut un certain nombre de dispositions de protection impérative du locataire.
En conséquence, notre lectrice sera bien inspirée de refuser de signer tout nouveau document et de consulter auparavant un spécialiste, pour que soit vérifié si le contrat qu’on lui soumet peut-être signé ou s’il péjore tant sa situation qu’elle devrait y renoncer.
Rappelons enfin que l’acquéreur peut résilier le bail à bref délai uniquement s’il entend faire valoir qu’il justifie d’un besoin urgent (pour lui-même ou un proche parent) de vivre dans le logement. Un locataire placé devant tel congé aura tout intérêt à le contester rapidement, pour faire vérifier si les conditions en sont réalisées.
Pierre STASTNY, ASLOCA Genève
Article publié dans la Tribune de Genève du 14 décembre 2022